Préambule

Gardons notre calme.

Pendant cette période difficile, différentes personnes à différents niveaux discutent d’un éventuel déploiement — et de ses conséquences — des applications mobiles de traçage numérique de contacts humains.

Or il me paraît bien clair que ce ne sont pas des applications informatiques qui vont vaincre le virus, ce sont nos systèmes immunitaires. Ils fonctionnent beaucoup mieux lorsque nos esprits sont calmes, nos ventres sont nourris et nos contacts sont limités. En assimilant des parties du virus, nos systèmes le combattront. Le résultat de ce conflit biologique dépendra de nombreux facteurs.

Concernant les mesures préventives, le port de masques est beaucoup mieux que n’importe quelle application mobile. Le masque protégera votre corps contre le virus et vos données contre des tiers.

Non-efficacite de traçage

Bien que certaines organisations et institutions aient accès à un grand nombre de moyens de suivi des appareils mobiles (géolocalisation par GSM, GPS, WiFi, etc) et des connexions sociales des personnes (Facebook, Twitter, etc) il faut constater que, malheureusement, on a perdu la bataille pour essayer de tracer la propagation du virus. Voici, comme exemple, les données d’investigation sur les causes de l’infection officielles pour les États-Unis :

Cause Nombre de personnes

Travel-related

6 814

Close contact

14 728

Under investigation

640 170

Le virus n’attendra pas la fin de l’enquête pour se propager.
Dans ce qui suit, je partage mon avis personnel sur plusieurs points.

Confinement

Pour moi, le confinement est une réaction brutale, qui reste en même temps très humaine, car il préserve la notion de la vie privée et nous protège des contacts qui pourront être considérés à tort comme non dangereux par l’algorithme imaginable "Smart Quarantine".

Tant que nous ne mourrons pas de faim et vivons dans des conditions acceptables avec la possibilité de sortir et prendre de l’air, je trouve que le confinement est bien. Chez nous, nous avons plus de temps (sauf dans des cas exceptionnels) pour réfléchir et approfondir la compréhension des sujets qui nous intéresse.

Traçage des contacts et la propagation des maladies

Il y a deux pandémies en ce moment: covid et le syndrome d’immunodéficience acquise. Les partisans de traçage de masse, proposez-vous donc de luter contre SIDA également par déploiement d’une application mobile ?

Peut-être il-serait mieux de faire comme dans un roman "Nous autres" ? C’est un roman — interdit en URSS — de science-fiction satirique écrit en 1920 par Évguéni Zamiatine, une source d’inspiration de George Orwell. Dans ce roman les bâtiments avaient des murs transparents, pour voir si votre voisin tousse ou fait une autre chose dangereuse.

On peut également imaginer la détection des éternuements avec l’accéléromètre de votre téléphone, comme certains personnes proposent sur le net… Après… il va falloir faire mieux que la nature et propager l’application plus vite que le virus se propage !

Soyons sérieux. D’un point de vue de gestion de maladie, il peut être très utile d’avoir la prédiction de la dynamique de sa propagation possibile en utilisant les contacts sociaux. D’un point de vue d’un individu, par contre, c’est clairement une atteinte à la vie privée. Certes, avec une application de traçage on peut avoir plus d’info sur les contacts et/ou positions spatiales des personnes. Mais, comment une telle information peut nous renseigner sur la propagation du virus, si on ne fait pas de tests ?

J’insiste sur le fait que, si on veut étudier la propagation d’un virus, il faut faire les tests pour mieux comprendre la situation. Je connais par exemple quelques personnes en Russie et en France qui avaient les symptômes du covid bien avant le confinement, en janvier 2020. Il me semble qu’une partie importante de la population est déjà infectée — sans le savoir. Mais combien exactement ? 10 %, la moitié ? On n’est pas capable de dire exactement, sans faire les tests.

Bien sûr, on ne peut pas tester toute la population d’un coup. Il faut donc prendre x% personnes aléatoires. La propagation du virus peut-être très différente de la propagation de cas nécessitant l’hospitalisation ! Pour comprendre s’il y a des cas isolés ou bien des clusters de personnes asymptomatiques qui ne sont pas directement associées à l’augmentation de la charge sur le système de santé, mais affectent la dynamique de l’infection — à mon avis — il est nécessaire de couvrir le plus largement possible la population par des tests, sans se limiter aux personnes ayant des contacts avec les gens qui sont très malades. Les spécialistes de l’épidémiologie pourront en dire plus sur ce point.

Il me semble très probable que l’humanité va adopter plusieurs stratégies de tests en parallèle, plusieurs méthodes pour combattre le virus : avec les applications mobiles, sans les applications etc. La nature n’a pas honte de nous paraître absurde. On doit essayer de vérifier toutes les hypothèses imaginables, si l’on souhaite la comprendre. Il faut admettre, que j’ai un peu du mal avec ce sujet… mais, par exemple, si on regarde l’évolution de la situation dans deux pays similaires A et B :

  • dans le pays A toute le monde utilise toutes sortes d’applications mobiles;

  • dans le pays B on n’utilise aucune application mobile.

On pourrait à postériori voir ce qui ce passe… et comprendre tous les avantages et les inconvénients de ces méthodes afin d’être prêt pour la prochaine épidémie de ce type. Peut-être il y a déjà les études dans ce sense dont je ne suis pas au courant. Si vous en savez plus, n’hésitez pas à me contacter.

Avons-nous le temps d’étudier en détails la propagation de ce virus maintenant ?
Ou c’est un incendie qui doit être éteint avant de commencer une enquête ?

Données personnelles versus données sociales

Il y a un certain nombre de personnes partageant leurs données volontairement, il suffit de regarder par exemple Facebook, Twitter et Tik-Tok. Cependant, vos liens sociaux ce ne sont pas vos propres données personnelles ! Ils touchent aussi les autres ! Il est nécessaire d’appliquer le principe de l’accord mutuel, car il existe une différence significative entre les données purement personnelles et les données sociales.

Sinon, c’est du n’importe quoi — "Wild West" des applications mobiles. Et bientôt on va avoir non seulement des applications traçant, sans ou avec votre accord, vos liens sociaux, mais également des applications qui vont tracer les "partagistes" : pour être sûr que votre interlocuteur ne partage pas vos données avec tiers.

NOUVELLE de 11 Mai 2020 : MIT a déjà commencé de tracer ces applications mobiles https://www.technologyreview.com/2020/05/07/1000961/launching-mittr-covid-tracing-tracker/

France — un symbole de la liberté

Dans le monde entier la France est perçu comme un symbole important de la liberté.

Il faut faire attention. Si l’utilisation d’une application de tracege va marcher en France peut-être sans beaucoup de problèmes, dans d’autres pays — qui vont sans doute prendre l’exemple de France — cela peut poser de très grands soucies, ça risque de donner lieu à une véritable chasse aux malades. Je vois très bien comment, dans certains cas, cela peut très mal tourner. Une telle application peut peut encourager les gens à écrire une dénonciation, voir discriminer les personnes en fonction de leurs contacts et de la fréquence de leurs déplacements et voyages.

On doit être très prudent, très très prudent, avec les données.

Quelques liens utiles

Articles, analyses et petitions




Discussions

Conclusion

Il est possible, que en cas d’urgence, l’utilisation d’une application de traçage des contacts peut être justifiée. Mais dans le cadre de vie normale, cela devrait être interdit. La majorité de personnes préférerait l’utilisation quotidienne des masques plutôt que de partager des informations sur leurs contacts avec des tiers.

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Sergey Kirgizov
28 Avril 2020
mis à jour le 11 Mai 2020
P.S.
  Je remercie mon ami, qui m'a aidé à la rédaction de ce texte,
  en souhaitant rester anonyme.